La possibilité de combler la brèche entre la publicité en ligne et les achats hors ligne est en quelque sorte le saint Graal des annonceurs numériques.
La plupart des achats se font hors ligne, mais la publicité numérique représente la plus grande part des dépenses publicitaires. On le sait pertinemment : il est particulièrement difficile d’établir un lien entre les dépenses publicitaires en ligne et les comportements hors ligne. Et toute plateforme publicitaire capable de prouver le retour sur investissement hors ligne de ses dépenses en ligne serait sans nul doute capable d’accroître ses recettes publicitaires en prouvant la valeur de son offre.
Google domine le marché de la publicité en ligne. Ses achats de services, tels que YouTube et Gmail, et sa capacité à localiser ses utilisateurs mobiles en utilisant leurs données de géolocalisation lui permettent d’avoir une vue d’ensemble de l’activité en ligne des consommateurs, à condition que l’utilisateur soit bien connecté aux services Google et ne désactive pas la géolocalisation.
Mais jusqu’ici, Google n’avait pas été en mesure de rattacher les annonces consultées à des comportements d’achat hors ligne. Ainsi, près de 83 % des transactions réalisées au Royaume-Uni et près de 85 % de celles réalisées aux États-Unis ne peuvent pas être rattachées à des efforts de publicité en ligne.
En s’associant à des entreprises capables de traiter les données de carte bancaire, Google pense être en mesure d’assurer le suivi des achats hors ligne et de les rattacher à des publicités interactives en ligne. Avec ce service, Google affirme pouvoir identifier l’argent dépensé par un consommateur hors ligne, après qu’il ait cliqué sur une annonce en ligne, alors qu’il était connecté aux services Google.
Il permet de rattacher les données d’annonces consultées à des paiements réalisés par carte bancaire, même si la technologie n’est visiblement pas configurée pour identifier ce qu’ils ont acheté ou le montant qui a été dépensé.
Google a pour ambition d’utiliser ces données afin d’informer les commerçants lorsque leurs annonces en ligne génèrent des achats hors ligne. Google semble être parvenu à « boucler la boucle » en offrant aux revendeurs une visibilité complète de l’activité du consommateur.
C’est une quasi-certitude : grâce à cette avancée, les recettes publicitaires de Google seront largement stimulées.
Les revendeurs les plus malins pourront ainsi cibler les consommateurs hors ligne à l’aide d’annonces en ligne ; quelque chose qu’ils n’avaient pu faire qu’à l’aveuglette par le passé.
Mieux comprendre le comportement du consommateur
Afin de surpasser le problème du « gaspillage » de clics dans la publicité en ligne. Par le passé, lorsqu’un consommateur cliquait sur une publicité mais ne finalisait pas sa démarche d’achat en ligne, l’annonceur partait du principe qu’il avait payé pour une publicité n’ayant pas débouché sur une vente.
Avec ce nouveau service d’affectation des ventes hors ligne de Google, il sera désormais possible de percevoir le véritable retour sur investissement de tous ces clics et de savoir ce qui se passe après que le consommateur ait cliqué sur une annonce.
Le géant de l’Internet affirme aujourd’hui que cette nouvelle avancée, permettant de rattacher les annonces en ligne aux comportements hors ligne, pourrait couvrir jusqu’à 70 % des transactions par carte. Si tel est le cas, son impact serait colossal. Ce service stimulerait non seulement les recettes publicitaires de Google, mais son influence irait beaucoup plus loin.
Les annonceurs obtiendraient une visibilité bien plus complète du consommateur, de ses goûts et de ses habitudes, et pourraient ainsi trouver le moyen de mieux les cibler, à chaque opportunité de vente. Cela donnerait également lieu à des opportunités d’amélioration du paysage de la vente hors ligne, et pourrait même déterminer où les magasins doivent être implantés.
Bien sûr, cette nouvelle visibilité présente des limites et des préoccupations légitimes quant à la confidentialité. Les consommateurs peuvent désactiver leurs données de géolocalisation, ce qu’ils font souvent. Ils paient également avec des moyens de paiement autres que ceux que Google peut traquer, ce qui limite la portée de la visibilité qu’a Google sur l’activité du consommateur. Mais une visibilité, ne serait-ce que partielle, de ce qui rattache les annonces en ligne consultées avec les achats hors ligne, serait extrêmement révélatrice. Les annonceurs n’ont pas besoin d’un portrait complet pour avoir une bien meilleure compréhension de la manière dont la publicité en ligne influence le comportement hors ligne.
Remettre en question la confidentialité du consommateur
Même si Google affirme que son nouveau service n’est pas capable d’identifier ce qui a été acheté, ni le montant dépensé, il est difficile d’affirmer que cette nouvelle avancée n’ébranle pas la confidentialité du consommateur. Google assure ne travailler qu’avec des entreprises habilitées à partager les données de consommateurs, mais cela ne veut pas pour autant dire que ces derniers leur ont donné l’autorisation de les partager.
La plus grande victime de cette dernière évolution n’est peut-être pas la confidentialité du consommateur, mais le paysage médiatique. La part attribuée à la publicité télévisée au sein des dépenses publicitaires est de plus en plus faible, car les budgets s’orientent toujours plus vers le numérique.
Ce qui a une incidence directe sur le paysage médiatique. L’affectation des dépenses publicitaires traduit généralement deux tendances : Tout d’abord, la volonté de capter l’attention du consommateur, et deuxièmement, celle de faciliter le retour sur investissement. De nos jours, la part d’attention des consommateurs détenue par la télévision ne cesse de diminuer, car Internet vampirise de plus en plus leur temps de loisir. Il est devenu beaucoup plus difficile d’attribuer le retour sur investissement aux annonces télévisées, plutôt qu’à la publicité en ligne. La publicité télévisée continue à perdre de sa superbe face au numérique, ce qui influence directement la programmation.
Le fait d’être capable de surveiller le comportement des consommateurs, aussi bien sur des canaux en ligne qu’hors ligne, est un grand pas en avant pour les annonceurs. Mais cette nouvelle avancée survient probablement au moment où les transactions humaines sont en voie de devenir obsolètes.
Alors que les assistants robotisés commencent à endosser la charge de nos tâches ménagères, nos décisions d’achat pourraient bientôt être réalisées en notre nom, par un assistant automatisé. Reste à déterminer l’impact que cette tendance aura sur les dispositifs de suivi des comportements de consommateurs mis en place par Google.